Les difficultés s’accentuent à une semaine des élections en République démocratique du Congo (RDC), alors que le conflit fait rage dans l’est, que les problèmes logistiques restent non résolus et que les craintes de fraude persistent.
Quelque 44 millions d’électeurs inscrits devrait voter dans ce vaste pays le 20 décembre, lors d’élections présidentielles, parlementaires, provinciales et municipales simultanées.
La taille même de la RDC, qui équivaut à peu près à la taille de l’Europe occidentale continentale, signifie que l’organisation d’élections est un cauchemar logistique.
Ce pays d’environ 100 millions d’habitants est également l’un des plus vulnérables au monde, avec très peu de routes et la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a toujours du mal à distribuer le matériel de vote.
Environ 100 000 personnes se présentent aux quatre élections, dont 22 pour la présidentielle.
Le président Félix Tshisekedi, arrivé au pouvoir après une élection contestée en 2018, est candidat à sa réélection.
La fraude reste une préoccupation majeure avant le vote de la semaine prochaine. Tous les principaux candidats de l’opposition à la présidentielle ont appelé à la vigilance.
L’opposition accuse depuis longtemps le gouvernement de compliquer la commission électorale ainsi que la Cour constitutionnelle, arbitre final des contentieux électoraux.
Mais les inquiétudes concernant les listes électorales demeurent également un problème, des personnalités de l’opposition ayant fait pression en vain pour un audit.
Le politicien de l’opposition Martin Fayulu a déclaré qu’il pensait qu’il y avait 10 millions de noms fictifs sur la liste. « Nous devons nous mobiliser pour mettre fin à cette parodie électorale », a-t-il déclaré.
« Ils pensent que le rôle a été falsifié, et il y a très peu de confiance dans le processus », a déclaré à l’AFP l’analyste politique congolais Alain de Georges Shukrani.
À la fin du mois dernier, dans une décision qui a ajouté aux soupçons persistants quant à l’équité, l’Union européenne a annulé sa mission d’observation électorale en RDC après avoir échoué à obtenir des autorisations pour utiliser des équipements satellitaires.
Problèmes techniques
Le vote en RDC aura également lieu alors que le conflit fait rage dans l’est du pays, en proie à des groupes armés depuis plus de trois décennies.
L’un de ces groupes, le M23 – prétendument soutenu par le Rwanda voisin – s’est emparé de pans de territoire dans cette région instable.
Selon les autorités, le vote ne peut avoir lieu dans deux territoires de la province du Nord-Kivu, Rutshuru et Masisi, en proie au conflit avec les combattants du M23.
Et mardi, la commission électorale a annoncé que les personnes déplacées par le conflit ne pourront pas non plus voter.
Après deux ans d’affrontements armés, plus d’un million de personnes ont été déplacées, selon les chiffres publiés fin novembre par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), dont beaucoup ont trouvé refuge dans des camps autour de Goma, la capitale provinciale.
Le conflit accentue la division traditionnelle de la RDC entre l’est et l’ouest.
« Il y a une détérioration de la cohésion nationale », a déclaré Shukrani, l’analyste politique, qui a souligné une légère hausse des discours qui divisent.
Mais la période de campagne a été épargnée par de graves violences.
Une personne a été tuée lors d’affrontements lors d’un récent rassemblement, et six autres ont été tuées lors d’une bousculade lors d’un rassemblement en faveur du président.
Les problèmes techniques restent néanmoins une préoccupation pressante.
La Ceni s’empresse de déployer des machines à voter à travers le pays.
Et un nombre non identifié de cartes d’électeurs sont devenues illisibles parce qu’elles ont été imprimées sur du papier bon marché. Beaucoup doivent être remplacés.
« Je ne peux pas voter avec une carte comme celle-ci », a récemment déclaré à l’AFP Grégoire-Dieudonne Kaykolongo, 75 ans, à Kinshasa, la capitale, en montrant une carte d’électeur presque vierge.
La semaine dernière, une lettre de la Ceni à la présidence demandant quatre avions et dix hélicoptères pour transporter le matériel de vote a été divulguée sur Internet, suscitant des craintes quant à la capacité à organiser l’élection à temps.
Le président de la Ceni, Denis Kadima, interviewé plus tard à la radio locale, a cherché à minimiser les inquiétudes.
« Je reste optimiste », a-t-il déclaré.
Opposition divisée
En l’absence de sondages crédibles, beaucoup hésitent à faire des prédictions fermes sur les résultats.
Mais avec la division de l’opposition, Tshisekedi est considéré comme celui qui a les meilleures chances de gagner.
Le scrutin présidentiel se déroule à un tour, de sorte qu’un seul candidat de l’opposition aurait les meilleures chances de vaincre l’avantage du président sortant.
Il est peu probable qu’un tel candidat se présente si tôt avant le vote.
Les principales personnalités de l’opposition candidates aux élections sont Moise Katumbi, un riche magnat et ancien gouverneur de province ; Martin Fayulu, un ancien cadre pétrolier qui affirme être le véritable vainqueur des élections de 2018 ; et Denis Mukwege, un gynécologue qui a remporté le prix Nobel de la paix pour son travail auprès des victimes de viol.